« Esprit d’hiver » de Laura Kasischke

Chroniques de livre & conseils de lecture.Esprit d'hiver de Laura Kasischke par MLBA.
Chroniques de livre & conseils de lecture.Esprit d’hiver de Laura Kasischke par MLBA.

Vous avez envie d’un roman qui vous surprenne, d’un huis-clos angoissant?
Vous aimez Paul Auster et Douglas Kennedy?
Voici ma potion:

L’histoire se passe le jour de Noël. Holly et son mari Eric, traînent au lit. Elle s’est réveillée un peu plus tôt prise d’une angoisse pour vérifier si sa fille dormait bien et, une fois recouchée, sombre à nouveau dans le sommeil. Au réveil, c’est la panique. Eric doit partir précipitamment chercher ses parents à l’aéroport. Holly, elle, doit préparer le repas car ils reçoivent toute la famille, comme tous les ans. L’humeur, aujourd’hui, n’y est pas.

Une longue journée commence alors. Tatiana, sa fille de 15 ans, agit bizarrement. Cette adolescente d’habitude très gentille et douce se révèle revêche et acerbe avec sa mère. Tout au long de cette journée, Holly va se rappeler comment ils ont adopté cette petite fille en Sibérie. Comment les choses se sont passées pendant leurs deux voyages là-bas, comment ils sont tombés fous amoureux de ses grands yeux. On comprend petit à petit que cet orphelinat perdu de Sibérie avaient des méthodes un peu particulières.

Tatiana se montre donc de plus en plus désagréable avec sa mère et celle-ci ne sait plus comment agir avec elle. D’autant plus qu’elles se retrouvent bloquées toutes les deux. Une tempête de neige sévit à l’extérieur, aucun des invités ne peut venir et son mari est coincé à l’hôpital, sa mère ayant fait un malaise. L’isolement va s’ajouter à l’ambiance lourde de la maison, une situation banale qui va devenir cauchemardesque.

Laure Kasischke, comme à son habitude, nous happe dans son univers. Elle arrive à distiller une angoisse sourde dans tous ses romans. Les choses semblent en apparence ordinaires mais il ne faut jamais s’y fier. Rien n’est comme on l’attend.

Elle aborde là le thème mère-fille, que ce soit Holly et sa fille Tatiana, mais aussi Holly et sa mère. On apprend que Holly a perdu sa mère très tôt d’une grave maladie, que sa soeur aussi est morte de cette maladie et qu’elle-même a décidé de tout se faire enlever pour ne pas mourir aussi. D’où l’adoption abordée aussi dans ce roman. Jusqu’où est-on prêt à aller pour avoir un enfant? Est-on prêt à fermer les yeux sur vraiment tout? Comment le lien se crée entre adoptés et adoptants ?

D’ailleurs que s’est-il vraiment passé en Sibérie? Qui ont-ils ramené? Holly se répète toute la journée ce mantra « quelque chose les avait suivies depuis la Russie ». Des questions dont on ne connaîtra la réponse qu’à la toute fin du roman, ce qui remettra en perspective celui-ci. Une fin hallucinante qui vous donnera envie de rouvrir le livre de suite.

Edition Christian Bourgois

« La nuit en vérité » de Véronique Olmi

Chroniques de livre & conseils de lecture la nuit en vérité de Véronique Olmi par MLBA
Chroniques de livre & conseils de lecture la nuit en vérité de Véronique Olmi par MLBA

Vous aimez les histoires de quête de soi, les romans sur l’adolescence?
Vous aimez Sylvie Germain, Claudie Gallay?
Voici ma potion:

Enzo, 12 ans, vit avec sa mère Liouba dans un grand appartement parisien. On comprend rapidement qu’ils ne sont pas chez eux. Liouba garde et fait le ménage de l’appartement pendant que les propriétaires sont en voyage.

Liouba est une toute jeune mère, Enzo étant né alors qu’elle n’avait que 16 ans. Enzo est un jeune garçon très enrobé qui subit constamment les mauvaises blagues de ses camarades. Il est la cible de toute la haine que peuvent contenir les adolescents. Non seulement il est hors norme parce qu’il est gros mais en plus il s’appelle Popov, sa mère ayant de lointaines origines russes, ce qui catalyse d’autant plus le regard des autres.

Véronique Olmi nous offre deux personnages mal dans leur peau et mal dans leur vie. Liouba est mère mais étant encore très jeune elle a aussi envie d’en profiter. Elle se lance tous les jours dans un ménage acharné alors que les propriétaires ne sont quasiment jamais là. Elle veut prendre soin de son fils sans réaliser ou sans vouloir s’avouer que celui-ci a des problèmes.

Enzo est un adolescent perturbé, mal dans sa chair, qui ne trouve que du bien-être en mangeant. Il est perdu, n’a jamais su qui était son père et n’ose pas poser de question à sa mère qui refuse de parler du passé ou de sa famille. Il subit les brimades des collégiens sans se révolter comme s’il acceptait tout ça, comme si c’était normal.

Jusqu’au jour où les brimades se transforme en véritable lynchage.

Le garçon échappe à sa condition par la lecture qui nourrit son imaginaire et surtout grâce à ses « virées » nocturnes. Dans ses rêves (bien qu’on ne sache jamais vraiment s’il est éveillé ou endormi), il s’enfuit de la petite chambre qu’il partage avec sa mère et rencontre des personnages, notamment un soldat russe de 14 ou un de ses ancêtres.

Véronique Olmi décrit avec justesse et tendresse cette relation mère-fils un peu marginale. Tout en pudeur, ces deux personnages ne savent pas comment se dire qu’ils s’aiment.

Enzo va devoir trouver tout seul une échappatoire à sa condition.

Beaucoup de thèmes sont abordés dans ce roman, outre la relation mère-fils, l’auteur parle de l’adolescence, de l’exclusion, de l’importance des origines et de savoir d’où l’on vient.

Un nuit en vérité pour une quête de soi.

Edition Albin Michel

« L’invention de nos vies » de Karine Tuil

Chroniques de livre & conseils de lecture. L'invention de nos vies de Karine Tuil par MLBA
Chroniques de livre & conseils de lecture. L’invention de nos vies de Karine Tuil par MLBA

Vous avez envie d’un roman qui parle d’identité, vous aimez les intrigues?
Vous aimez Frédérique Deghelt ou Alice Ferney?
Voici ma potion:

L’invention de nos vies c’est l’histoire d’une imposture.

Trois amis inséparables: Samuel et Nina, qui sont en couple, et Samir. Alors que Samuel part enterrer ses parents, morts dans un accident, Samir séduit Nina dont il est épris depuis leur rencontre. Pourtant quand Samuel revient, Nina le choisit et reste avec lui. Samir, lui, disparaît.

Vingt ans plus tard, Samuel est un écrivain raté, Nina toujours à ses côtés, ils vivotent dans un appartement minable. Un soir, à la télé, ils aperçoivent Samir, qui est devenu un brillant avocat à New-York. Tout lui a réussi, une carrière fantastique, un mariage de rêve avec une des héritières juives les plus riches de New-York et deux beaux enfants.

Mais tout ceci ne repose sur rien de vrai. Samir, alors qu’il cherchait du travail et que tous les cabinets d’avocats lui claquaient la porte au nez, décide de raccourcir son prénom à Sam. On le prend alors pour un juif et lui, loin de démentir, s’approprie cette nouvelle identité ainsi que le passé de son ami Samuel.

Nina et Samuel décident quant à eux de reprendre contact avec lui. Décision qui va mettre en branle de lourdes conséquences pour chacun.

Karine Tuil nous fait entrer dans cette spirale du mensonge.

Comment un petit mensonge, un « non-démenti », va entrainer de gros mensonges jusqu’à ne plus savoir qui on est vraiment.

Samir Tahar est un personnage complexe, enfermé dans ses mensonges, les retrouvailles avec ses anciens amis vont servir de catalyseur afin qu’éclate la vérité.

Karine Tuil parle dans ce roman de l’idée d’identité, que ce soit au sens premier du terme (peut-on vivre toute une vie en mentant à tout le monde, en n’étant pas vraiment soi-même?), de l’identité au niveau culturel (peut-on vivre en reniant ses racines, ses origines? Samir est musulman, Samuel juif). Elle traite aussi de l’identité sociale, comment le rang que l’on occupe dans la société peut évoluer, un jour en haut de la pyramide, le lendemain en bas ou inversement, et bien sûr comment les gens nous perçoivent selon notre rang.

Vous trouverez des réponses à toutes ces questions dans ce beau roman qui se lit presque comme un thriller.

Edition Grasset

« Les perroquets de la place d’Arezzo » de Eric-Emmanuel Schmitt

Les perroquets de la place d'Arezzo
Chroniques de livre & conseils de lecture. Les perroquets de la place d’Arezzo de Eric-Emmanuel Schmitt par Ma Libraire Bien-Aimée.

Vous aimez les histoires d’amour, les romans chorale?
Vous aimez Anna Gavalda ou Joseph Connolly?
Voici ma potion:

Une lettre anonyme vient perturber le quotidien du quartier de la place d’Arezzo à Bruxelles. Quartier très huppé fréquenté depuis de longues années par toute une population de perroquets et autres perruches, on raconte qu’un consul brésilien séjournant dans le quartier est reparti en libérant ses volatiles. Ceux-ci donnant une ambiance exotique au lieu.

Cette lettre anonyme ne vient pas d’un corbeau désireux de médire sur les gens, il s’agit là au contraire d’un message d’amour: « Ce mot simplement pour te signaler que je t’aime. Signé: tu sais qui. »

Chaque riverain de la place d’Arezzo reçoit sa petite missive et celle-ci va engendrer bien des conséquences, permettant à certains de dévoiler leur amour, à d’autres d’y mettre fin, bref personne ne sera épargné.

Eric-Emmanuel Schmitt nous propose un beau panel des comportements amoureux et sexuels du xxi ème siècle.

Il décrit tous les scénarios imaginables : du jeune homme puceau ne supportant pas les contacts physiques au trio amoureux, du couple gay à l’adepte du sado-maso, du transexuel à l’homme politique se servant de son pouvoir pour abuser des femmes (qui n’est pas sans nous rappeler quelqu’un).

Tout le monde s’aime ou se déteste ou les deux, tout le monde couche avec tout le monde. Les habitants de ce quartier à l’instar des perroquets ont un appétit sexuel débordant.

Les personnages, faisant l’objet chacun leur tour d’un chapitre, sont haut en couleurs, ils ont tous en eux des souffrances intérieurs et sont tous très complexes.

On sent bien que Eric-Emmanuel Schmitt s’est amusé en écrivant ce livre et il ne faut pas avoir peur du pavé de sept cent pages, il se lit très facilement.

Un roman fleuve comme essai sociologique du comportement amoureux.

Edition Albin MIchel

« La grâce des brigands » de Véronique Ovaldé

La grâce des brigands de Véronique Ovaldé. Chronique par Ma Libraire Bien-Aimée
Chronique de livres & conseils de lecture. La grâce des brigands de Véronique Ovaldé par Ma Libraire Bien-Aimée

Vous aimez les histoires de femmes passionnées, l’idée de liberté ?
Vous aimez Olivier Adam et Karine Tuil ?
Voici ma potion :

Maria Cristina Vaatonen reçoit un coup de fil de sa mère dont elle n’a aucune nouvelle depuis de longues années. Celle-ci lui apprend que sa sœur a eu un enfant et qu’il faut qu’elle revienne pour le récupérer et l’adopter.

Maria Cristina avait quitté Laperouse, sa ville natale de Finlande, vingt ans plus tôt pour venir faire ses études à Los Angeles. A l’époque elle n’avait pas simplement quitté la froideur du grand nord mais aussi la pression d’une mère engoncée dans ses vieilles traditions, à moitié folle, la jalousie d’une sœur et le mutisme d’un père qui l’aimait et la préférait sans jamais avoir su lui dire.

Elle débarque à Los Angeles, âgée de seize ans, comme une véritable paysanne. Elle ne s’était jamais rasé les jambes, ne se lavait qu’une fois par semaine, bref, elle découvre un tout nouveau monde.

Maria se met en colocation avec Joanne, une sorte de hippie délurée, enceinte qui plus est. Celle-ci va la mettre à la page concernant les coutumes du coin. La rencontre de Maria avec Claramund, auteur sud-américain à succès, va être déterminante pour elle. Il va non seulement l’initier au sexe mais aussi lui permettre de faire éditer son premier roman.

Véronique Ovaldé raconte l’itinéraire d’une femme, comment celle-ci après une enfance relativement traumatisante et anxiogène va murir, comment libérée du joug maternel elle va s’épanouir. Tout en restant une personne mal dans sa peau, indécise, elle cherche son émancipation de manière entêtée et parfois de manière totalement irresponsable (la scène du viol).

L’auteur nous conte de nouveau l’emprise que peut avoir la famille sur un être, et combien il est important pour cet être de se libérer afin de se trouver.

Un très beau roman, une écriture et une narration très particulière qui ne peut que vous emporter.

Editions de l’Olivier

« Back up » de Paul Colize

Back up de Paul Colize. Chronique par MLBA
Chronique de Back up de Paul Colize  par MLBA

Vous aimez le rock’n roll et les riffs de guitare?
Vous aimez David Khara ou Luc Bossi?
Voici ma potion:

En 2010 un homme est renversé par une voiture à Bruxelles. Il se réveille à l’hôpital sans pouvoir ni bouger, ni parler, atteint du Locked-in syndrom.

En 1967 tous les membres du groupe Pearl Harbor meurent les uns après les autres.

Par chapitres interposés le lecteur apprend l’histoire du groupe, l’enquête sur leurs décès menée par un journaliste et la rééducation de l’homme accidenté surnommé x-midi. On alterne donc entre passé et présent. X-midi ne peut plus parler mais étant tout à fait conscient, il raconte d’où il vient. Cela débute alors qu’il découvre le rock’n roll à la fin des années 50. Il se prend de passion pour la musique et surtout pour la batterie, il va suivre le mouvement en Europe, de Bruxelles il va passer par Paris, Berlin et Londres. A travers son parcours on assiste aux débuts du rock sur vinyls, aux premiers concerts avec filles hystériques et aux dérives dues à l’excès de drogue. C’est toute une génération qui est dépeinte.

Quel est le lien entre X-midi et le groupe Pearl Harbor?

L’auteur construit son roman comme un véritable chef d’orchestre. Il distille les informations petit à petit, on ne peut que se laisser entrainer par sa petite musique. Comme il a aimé à le faire dans son dernier roman « un long moment de silence », Paul Colize mélange la petite histoire à la grande.

Un livre plein de suspense à lire en écoutant, si possible, la playlist proposée par l’auteur en début de roman.

Edition Folio

« Le linguiste était presque parfait » de David Carkeet

Le linguiste était presque parfait de David Carkeet. Chronique par MLBA
Le linguiste était presque parfait de David Carkeet. Chronique par MLBA

Vous aimez l’humour décalé et les jeux de mots?
Vous aimez David Lodge?
Voici ma potion:

Jeremy Cook, linguiste, travaille à Wabash, un centre d’étude du langage. Sept linguistes étudient au quotidien des enfants de 6 mois à 5 ans (le centre faisant aussi office de crèche) afin de décrypter comment se fait l’acquisition du langage.

Mais un jour un de ses collègues est retrouvé mort, assassiné, dans son bureau. Tout l’accuse, d’autant qu’il était sur les lieux au moment du meurtre.

En parallèle de l’enquête du truculent inspecteur Leaf, sorte de Groucho Marx fort en gueule, Jeremy va mener grâce à la linguistique sa propre investigation. Chaque parole, chaque mot est passé au crible et décortiqué afin de découvrir la vérité. Il va de même chercher la personne responsable de la rumeur comme quoi il serait « un trou du cul » et devoir rédiger une conférence dont l’intitulé change tous les jours.

L’assassin est forcément un de ses collègues, seule une personne ayant les clés du centre a pu faire le coup. Chacun s’accuse mais toujours de manière tout à fait courtoise. Le meurtre va d’ailleurs servir de révélateur des amitiés ou inimitiés au sein des linguistes.

Sous couvert de polar, voilà un roman plein d’humour subtile et terriblement déjanté. David Carkeet nous offre un panel de personnages excentriques adeptes de joutes verbales. Apparemment on ne pourrait être un chercheur sans être un brin cinglé!

On ne peut pas lâcher ce roman avant de l’avoir fini et on est déçu de l’avoir lu si vite. Encore un paradoxe que sauraient nous expliquer les linguistes de ce roman si distrayant.

Edition Monsieur Toussaint Louverture

Le Steampunk à l’honneur

Confessions d'un automate mangeur d'opium de Mark Hodder
Confessions d’un automate mangeur d’opium de Fabrice Colin et Mathieu GAborit
L'étrange affaire de Spring Heeled Jack de Mark Hodder
L’étrange affaire de Spring Heeled Jack de Mark Hodder

Vous ne connaissez pas le Steampunk ?
Vous aimez Jules Verne et HG Wells ?
Voici ma potion :

Le Steampunk est un genre de science-fiction, une sorte de rétro-futurisme, on parle aussi d’uchronie. L’action se passe généralement au 19ème siècle dans une société industrielle futuriste, saturée d’inventions utilisant la vapeur. Les machines y ont une place importante, machines qui échappent d’ailleurs parfois au contrôle de leurs créateurs.

Deux ouvrages sortis récemment dans de nouvelles éditions mettent à l’honneur ce genre : Confessions d’un automate mangeur d’opium de Fabrice Colin et Mathieu Gaborit et L’étrange affaire de Spring Heeled Jack de Mark Hodder.

Confessions d’un automate mangeur d’opium se passe à Paris en 1889, lors de la grande exposition universelle. La ville est envahie d’aéroscaphes et autres machines volantes, les automates sont partout au service des hommes. Margaret Saunders , jeune actrice reconnue, va se lancer dans une enquète suite au décès de sa meilleure amie, décès survenu dans d’étranges circonstances. Elle sera aidée par son frère Théo, médecin dans un asile d’aliénés et fasciné par les pouvoirs de l’éther, substance servant à faire marcher toutes leurs machines.

Les deux protagonistes vont se lancer tête baissée dans leur enquête et vont affronter des choses qui les dépassent.

L’investigation qu’ils mènent est un prétexte pour les auteurs afin de mettre en valeur l’esthétique du genre, on croise dans ce roman bien évidemment des automates, des machines volantes les plus délirantes, des savants fous, on y croise aussi Sarah Bernhardt, Villiers de l’Isle Adam ou encore la reine Victoria.

Un roman de steampunk des plus accessibles !

L’étrange affaire de Spring Heeled Jack se déroule lui à Londres en 1861. Il s’agit ici aussi d’une enquête mais d’un ordre tout à fait différent.

Sir Richard Burton, aventurier et explorateur, en perte de notoriété, se fait agresser un soir par un homme monté sur échasses qui lui parle de manière très détaillée de son avenir et des décisions qu’il va prendre. Le lendemain il est appelé par le Premier Ministre qui le charge d’une mission, découvrir la vérité sur des agressions de jeunes filles commises par un étrange personnage, Spring Heeled Jack. Accompagné de son acolyte Swinburne, poète aux tendances masochiste et alcoolique, il se lance dans cette enquête où ils croiseront des loups-garous, des hommes aux pouvoirs étranges, un ours qui parle et Charles Darwin.

Mark Hodder réussit à créer un monde fantasmagorique où des personnages ayant réellement existé comme Burton côtoient des créatures fantastiques tels ce fameux Jack, issu du folklore britannique, il crée un monde divisé entre les Technologistes et les Libertins, un monde où il y a une surenchère d’inventions plus incroyables les unes que les autres, les rotochaises ou autres chevaux à vapeur , un monde perpétuellement en guerre.

Le roman n’est pas dénué d’humour, vous noterez les perroquets servant de messagers, atteints du syndrome Gilles de la Tourette.

Mark Hodder mêle habilement plein de genres différents : le steampunk bien sûr, la science-fiction, le roman uchronique, le roman policier tout ça assaisonné de paradoxes temporels.

Laissez-vous embarquer par ces Sherlock Holmes d’un genre nouveau.

Confessions d’un automate mangeur d’opium Edition Bragelonne

L’étrange affaire de Spring Heeled Jack Edition Bragelonne

« Un long moment de silence » de Paul Colize

Chronique de Un long moment de silence de Paul Colize par MLBA
Chronique de Un long moment de silence de Paul Colize par MLBA

Vous aimez le suspense et les polars à matière grise?
Vous aimez Elmore Leonard, Dennis Lehane?
Voici ma potion:

Paul Colize nous livre là un roman assez époustouflant, avec une construction narrative très complexe et habile .Le lecteur est invité à suivre l’histoire de deux hommes à deux époques différentes.

De nos jours nous avons celle de Stanislas Kervyn, la cinquantaine, à la tête d’une société de conseils en informatique, chef d’entreprise exécrable, égocentrique et obsédé sexuel. Excessif dans tout ce qu’il entreprend. Il a écrit un livre sur l’histoire de son père, abattu lors de la tuerie du Caire en 1954. Que faisait-il au Caire? Qui était visé lors de cette attaque? Autant de questions auxquelles il n’a pu répondre. Lors d’un passage à la télévision pour parler de son ouvrage, un homme cherche à le contacter, il détient de nouvelles informations sur le père de Stanislas. Son enquête va alors repartir de zéro et il ne va pas tarder à déterrer des secrets de famille.

Après guerre nous suivons aussi l’histoire de Nathan Katz, miraculé des camps de concentration, qui se retrouve à New-York avec son père, les deux seuls rescapés de leur famille. Suite à une très violente altercation avec des italiens qui avaient tenu des propos antisémites, Nathan est repéré par un groupe occulte, « le Chat », groupe dont le but est de traquer et de punir les nazis ayant échappé à la justice. Il va alors subir un entrainement digne des commandos et se lancer dans cette action à corps perdu, quitte à laisser ses proches derrière lui.

Ces deux hommes finiront par se rencontrer, ils sont liés quelque part, on en a l’intime conviction, mais de quelle manière?

Ce roman court de 1920 à nos jours, il met à jour des pans de notre histoire mondiale qui étaient méconnus. Cette organisation du « Chat » aurait réellement existé mais sous un autre nom. L’auteur raconte sous de faux noms l’histoire de sa famille.

C’est un roman qui parle de vengeance et de pardon.

Doit-on donner libre cours à sa vengeance et surtout jusqu’où peut-on aller par vengeance? A-t-on le droit de vie et de mort sur une personne, même si celle-ci a commis les pires horreurs?

Tant de questions soulevées dans ce roman mené de main de maître par son auteur Paul Colize.

Edition la Manufacture des livres

« La première chose qu’on regarde » de Grégoire Delacourt

La première chose qu'on regarde de Grégoire Delacourt
La première chose qu’on regarde de Grégoire Delacourt

Vous aimez les contes de fées.
Vous aimez David Foenkinos et Anna Gavalda.
Voici ma potion :

Le nouveau roman de Grégoire Delacourt parle d’amour, de ce que l’on voudrait être, du fait d’être catalogué par le regard des autres.

Un matin, Arthur Dreyfuss voit débarquer Scarlett Johansson chez lui. Situation complètement absurde a priori et c’est après des recherches sur le net qu’Arthur comprend que ce n’est pas elle mais Jeanine Foucamprez qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau. Ne dit-on pas de lui « qu’il ressemble à Ryan Gosling, en mieux » alors pourquoi ne pourrait-il pas avoir Scarlett dans son salon ?

Ces personnages, tous les deux traumatisés et cassés par la vie, vont apprendre à se reconstruire ensemble, enfin vont essayer.

Ce roman, ça aurait pu être une banale histoire d’amour, un vrai conte de fées mais en réalité c’est loin d’être le cas.

Arthur est seul. Après que sa petite sœur soit morte suite à l’attaque d’un chien, sa mère s’est plongée dans l’alcool et son père s’est enfui. Jeunesse douloureuse mais il réussit tant bien que mal à faire sa vie, devient garagiste et a même acheté sa petite maison, une sorte d’aboutissement.

Jeanine n’a jamais connu son père et sa mère l’a tout bonnement rayé de sa vie après l’avoir trouvé en train de faire des photos dénudées pour son beau-père. Le problème de Jeanine, le problème de sa vie, c’est qu’elle est trop belle, qu’elle ressemble terriblement à une actrice américaine et que personne ne cherche à la connaître pour ce qu’elle est, elle.

Un jour qu’elle passe par hasard à Long, le petit village où habite Arthur, elle tombe sous son charme et se plaît à croire qu’il peut la sauver.

Mais voilà les choses ne sont pas si simples, la vie recèle de douloureux aléas.

C’est un roman véritablement émouvant, beaucoup plus profond et touchant que le précédent, La liste de mes envies, qui avait un ton plus léger.

On assiste à la naissance d’un amour, on sent que ces deux personnes sont faites l’une pour l’autre et on redoute que la fin ne soit pas le happy-end escompté.

Delacourt aborde le sujet des apparences, de l’hyper féminité devenant un handicap.

Alors bien sûr on peut émettre des critiques, dire que les personnages sont un peu trop stéréotypés, que les blessures d’hier ne font pas forcément des traumatisés à vie mais on peut aussi se laisser emporter par la poésie qui émane de tout ça et par l’écriture très légère.

Vous vous attacherez à Arthur et Jeanine, vous aurez envie que la vie soit enfin belle pour eux mais ne vous attendez surtout pas à une fin heureuse et préparez les mouchoirs si vous avez la larme facile.

Edtion Lattès