« Un assassin parmi nous » de Shari Lapena

Le Mitchell’s Inn est un petit hôtel au milieu de la forêt dans les Catskills. Quelques clients ont réservé pour le week-end malgré la tempête de neige en approche. Alors que leur séjour débute, le courant et toutes les communications sont coupées. Le lendemain l’une des clientes est retrouvée morte au bas des escaliers. Impossible de prévenir les autorités.


Shari Lapena nous offre un huis clos digne de la reine du thriller, Agatha Christie. Une ambiance stressante, des personnages qui se soupçonnent tous, une météo apocalyptique, tous les ingrédients pour tenir le lecteur en haleine jusqu’au bout.

Et ça marche. Malgré quelques faiblesses dans la composition des personnages, on lit ce thriller avec plaisir. Idéal pour les vacances.

Edition Pocket

« Rédemption » de Matt Lennox

Leland King revient dans sa ville natale de l’Ontario après avoir passé dix-sept ans en prison. Sa mère est en train de mourir d’un cancer, sa sœur s’est mariée à un pasteur limite extrémiste et son neveu Pete essaie de s’en sortir après avoir quitté l’école. On ne sait pas tout de suite ce que Leland a fait mais son retour n’est pas apprécié par les gens du patelin. L’accueil est très froid notamment des autorités et de Stan Maitland, ancien flic à la retraite.


Un superbe roman à l’américaine dans la veine d’un Joseph Boyden ou Richard Russo. Matt Lennox, dont “Rédemption” est le premier roman, montre un talent certain pour les mots. Il décrit à merveille l’ambiance de cette petite ville où la religion a une grande place. Tout est extrêmement bien écrit, les personnages sont authentiques et les sentiments qui les traversent sont très forts.

Une sorte de fresque social où le sens moral, le respect de la famille sont primordiaux. Va-t-il être possible à Leland d’atteindre la rédemption ?


Je vous laisse lire ce beau roman pour le savoir!

Edition Albin Michel ou Le Livre de Poche

« Dans la forêt » de Jean Hegland

Nell et Eva sont sœurs, elles ont 17 et 18 ans quand leur monde s’effondre. Alors qu’elles vivent isolées dans la forêt avec leurs parents depuis toujours, la civilisation subit de grands changements. Des maladies, des guerres vont les isoler encore plus. Leurs parents décèdent l’un après l’autre et elles se retrouvent vraiment seules, à devoir survivre comme elles le peuvent, chacune avec sa passion, la danse pour Eva et la lecture pour Nell.

L’autre grand personnage de cette histoire est la forêt, lieu protecteur, qui peut permettre de manger et de se soigner si on apprend à la connaitre. Nell, grâce aux livres laissés par sa mère, va apprendre peu à peu les bienfaits des plantes qui poussent autour de chez elles.

C’est une histoire intense avec une narration qui peut sans doute en rebuter certains. Le rythme est lent, on est au jour le jour avec les filles dans leur quotidien et je trouve que c’est ça qui permet d’être en total communion avec elles.

Le lecteur n’apprendra jamais les raisons de cette fin du monde parce que ce n’est pas ça l’important dans l’histoire. L’important est de comprendre comment vont vivre ces deux jeunes filles, livrées à elles-mêmes dans cette nature qui peut être hostile et amicale dans le même temps.

C’est un magnifique roman d’apprentissage. Le monde s’écroule, il n’y a plus d’essence ou d’électricité mais la nature et la forêt pourvoient à tous les besoins essentiels. C’est finalement une belle ode à l’écologie et au retour à la nature. Cette histoire fait aussi la part belle aux liens du sang, le soutien infaillible qu’il peut y avoir entre deux sœurs.

Troublant et percutant.

Edition Gallmeister

« Les fantômes de Reykjavik » de Arnaldur Indridason

Konrad, qui est policier à la retraite, est contacté par des amis de sa défunte femme. Leur petite-fille Danni a disparu et même si celle-ci avait plongé dans la drogue, la police ne prend pour l’instant pas la chose au sérieux car elle est majeure.

Alors que Konrad commence à enquêter pour les rassurer, Eyglo, une amie, lui parle d’une petite fille morte noyée des dizaines d’années auparavant et qui vient la hanter régulièrement. Même si Konrad ne croit pas aux fantômes, il s’intéresse à l’histoire. D’autant plus que son père et celui de Eyglo avaient monté une arnaque ensemble et faisaient croire à des personnes crédules qu’ils communiquaient avec les défunts. Les souvenirs remontent à la surface.

Le lecteur peut retrouver ici le talent de Arnaldur Indridason, auteur de polar islandais. Sa manière, bien à lui, de raconter une histoire, ou plutôt des histoires passées et présentes qui vont s’entremêler. Grande fan de son personnage récurrent de Erlendur, j’avais peur de ne pas pouvoir sympathiser avec sa nouvelle figure policière mais je dois dire que Konrad est très bien trouvé. Un peu bourru, têtu, volontaire et surtout attentif, il est marqué par une jeunesse auprès d’un père escroc et violent. Parfait pour devenir un nouveau personnage récurrent.

Comme à son habitude Indridason déroule son histoire par petites touches, ici vous n’aurez pas de grands rebondissements, ni de courses poursuites mais une enquête et un enquêteur qui prend son temps, qui rassemble tous les éléments à son rythme. Ça insuffle une ambiance à tout le roman, une tension latente qui est très addictive. Je me suis surprise à ne pas vouloir le lâcher avant d’avoir fini. Le cadre aussi joue son rôle, l’Islande est toujours un des personnages du romancier.

Pour les amoureux du style scandinave et les autres, du très bon Indridason.

« My absolut darling » de Gabriel Tallent

L’univers de Julia Alveston alias Turtle tourne autour de son père, manipulateur et violent, et les bois autour de chez elle, qu’elle arpente fusil à la main. A 14 ans sa seule vie sociale se résume au lycée où elle n’a pas d’amis. Jusqu’au jour où elle rencontre Jacob et Brett, deux adolescents perdus dans la forêt à qui elle apporte son aide. 

Elle comprend alors que la vie qu’elle mène avec son père n’est peut-être pas irréversible et qu’elle peut chercher sa liberté.  

« My absolut darling » est une véritable claque littéraire, d’une puissance et une intensité folle. Gabriel Tallent démontre un talent dingue avec ce roman sur la relation exclusive et ambivalente entre un père et sa fille. Sous couvert de survivalisme Martin garde sa fille près de lui dans une relation de dépendance affective. Il lui voue un amour absolu, total, à la limite de la folie. 

Turtle va devoir briser le carcan paternel et se dépasser pour s’en sortir.  

C’est violent, empli de colère et de révolte et ça prend le lecteur aux tripes. Impossible de lâcher ce roman une fois qu’on l’a commencé.  

Edition Gallmeister

« L’inconnu de la poste » de Florence Aubenas

Dans un petit village de l’Ain, Montréal-la-Cluse, un crime sordide a lieu le 19 décembre 2008. Catherine Burgod qui travaillait au bureau de poste, est assassinée de 28 coups de couteau. Enceinte de 5 mois, cette jeune quarantenaire était aimée de tous. Crime crapuleux, crime passionnel, le mystère est entier.

Habitant alors en face de la poste, le comédien Gérald Thomassin est rapidement soupçonné. Cet acteur découvert par Jacques Doillon est tombé dans la délinquance et les excès suite au tournage. Enfant de la DDAS, il est resté dans la marge malgré ses succès au cinéma.

Florence Aubenas prend ce fait divers à bras le corps. Une enquête minutieuse sur ce qui a pu arriver à Catherine Burgod mais aussi sur le destin d’un jeune homme prometteur. C’est une enquête en immersion mais on lit ça comme un véritable roman. Florence Aubenas égrène les évènements et capte l’attention du lecteur comme dans un véritable page-turner. Elle donne la parole à tous les protagonistes, tous ceux ayant eu un lien avec l’histoire ce qui donne encore plus de puissance au récit.

La vie de Gérald Thomassin est en effet digne d’un roman à la Dickens. Abandonné par sa mère, père inconnu, élevé dans des foyers, livré très tôt à lui-même, alcoolique, drogué, il aurait pu s’en sortir grâce au cinéma mais on n’échappe pas facilement à ses démons. Florence Aubenas reste toujours observatrice sans jamais prendre de partie.

Un récit passionnant sans conclusion car l’affaire n’est toujours pas résolue.

Edition de l’Olivier

« Une bête au paradis » de Cécile Coulon

Le Paradis est une ferme où Emilienne élève seule ses deux petits-enfants, Blanche et Gabriel. Leurs parents sont morts au détour d’un virage. Elle recueille également Louis, un adolescent battu par son père, qui va faire du Paradis son seul univers. 

A l’adolescence Blanche rencontre Alexandre, un garçon beau et solaire. Ayant beaucoup de facilités, Blanche aide Alexandre à remonter sa moyenne. 

Premier copain, premier amour et premier chagrin. 

« Une bête au paradis » c’est l’histoire d’un amour fou. Un amour pour une ferme, pour une terre mais aussi pour un homme. Un amour qui fait perdre la tête et oublier les choses et les gens qui comptent vraiment. 

Blanche est une femme dont la passion l’emporte sur la raison, pour qui la sensation et le ressenti prime sur le reste. L’odeur d’un corps comme l’odeur d’une bête. 

On assiste à un huis clos oppressant, la tension nait petit à petit, tous les personnages agissent et réagissent intensément, de manière viscérale. C’est violent et beau en même temps et très poétique comme peut l’être Cécile Coulon.  

Quand le Paradis rejoint l’enfer. 

Edition Le Livre de Poche

« Le consentement » de Vanessa Springora

Vanessa a 13 ans quand elle rencontre l’écrivain G.M. par le biais de sa mère qui travaille dans une maison d’édition. Très vite celui-ci commence à lui écrire. Vanessa ne voit jamais son père, celui-ci instable a fini par quitter le foyer. Elle est en manque de figure paternelle et voit en G. la chance d’être aimée par un homme comme son père. 

Commence alors l’emprise de cet homme de quarante ans son aîné sur cette jeune fille en manque d’attention. Il l’initie aux plaisirs sexuels et n’hésite pas à emmener sa petite conquête partout où il va. Peu de monde trouve cette relation malsaine à l’époque, même pas la mère de Vanessa. 

Il était une époque où un écrivain pouvait raconter ses exploits sexuels avec des mineurs garçons ou filles et ça ne choquait personne. On l’invitait même à de célèbres émissions littéraires. Ce même écrivain était certain d’être un bienfaiteur auprès de ces enfants, il les initiait, rien de mal à ça. 

Vanessa Springora raconte autre chose. L’histoire de l’emprise, de la manipulation, de la perversion d’un homme sur un esprit faible. Comment cette expérience a quasiment détruit sa vie, incapable pendant de longues années d’avoir une vraie relation avec un homme. 

Le consentement est une notion abstraite. Quel consentement peut donner une adolescente perdue entre un père absent et une mère démissionnaire ? Est-elle capable de consentir à quoi que ce soit ou simplement cherche-t-elle un peu d’attention pour exister ? 

Vanessa Springora nous livre son histoire, dure, sans fioritures ni faux-semblants pour enfin se libérer de cet homme qui a souillé plus que son corps. 

Edition Le Livre de Poche

« Né d’aucune femme » de Franck Bouysse

Alors que Gabriel est un jeune curé de campagne, il est appelé pour faire la mise en terre de Rose, morte à l’asile du coin. La veille lors d’une confession une femme lui demande de récupérer des carnets noirs qu’elle aurait caché sous la robe de la morte. Malgré ses réticences il décide de prendre les carnets et de les lire.

Dans une petite ferme, Rose est l’aînée de quatre filles. A 14 ans son père décide de la « vendre » à un gros propriétaire terrien de la région. Celle-ci est emmenée sans savoir ce qu’on attend d’elle. Une nouvelle vie faite de souffrance et de désillusion.

Je n’avais entendu que du bien de ce roman de Franck Bouysse et j’hésitais à le lire de peur d’être déçue. En fait ça a été la claque. Un roman d’une puissance étonnante. Dès les premières pages on sent qu’on entre dans une histoire particulière.Les personnages sont forts et complexes, les paysages extrêmement bien décrits participent à l’univers et l’écriture est magnifique.

Malgré la dureté et la violence de l’histoire ce n’est pas glauque, juste réaliste. Le destin de Rose est émouvant et déchirant. Le lecteur est en empathie totale avec elle. Réussir à saisir les lecteurs à ce point est l’apanage des grands écrivains. On referme ce roman avec un sentiment partagé entre tristesse et espoir.

Pour les quelques personnes qui ne l’auraient pas encore lu, vous pouvez vous y plonger sans crainte.

Édition Le Livre de Poche

« A même la peau » de Lisa Gardner

Dans la région de Boston, deux meurtres sont perpétrés à quelques semaines d’intervalle. Des femmes seules, retrouvées chez elles, mutilées, la peau arrachée.

L’inspectrice D.D. Warren se met sur l’affaire mais alors qu’elle était sur une des scènes de crime, elle fait une mauvaise rencontre et finit en bas des escaliers. Blessée, elle s’investit tout de même dans l’enquête. D’autant plus qu’il apparaît que ces meurtres en rappel d’autres commis quarante ans plus tôt.

Pour les aficionados de Lisa Gardner, le personnage de D.D. Warren est loin d’être une inconnue, pour les autres ils vont apprendre à connaître ce flic un peu tête brûlée qui travaille à l’instinct.

Lisa Gardner nous accroche une nouvelle fois avec cette histoire macabre où les liens de sang semblent être plus fort que le temps. Peut-on réellement se défaire de sa lignée familiale ?

Un très bon thriller signée par la nouvelle reine du polar américain.

Édition Le Livre de Poche