« L’inconnu de la poste » de Florence Aubenas

Dans un petit village de l’Ain, Montréal-la-Cluse, un crime sordide a lieu le 19 décembre 2008. Catherine Burgod qui travaillait au bureau de poste, est assassinée de 28 coups de couteau. Enceinte de 5 mois, cette jeune quarantenaire était aimée de tous. Crime crapuleux, crime passionnel, le mystère est entier.

Habitant alors en face de la poste, le comédien Gérald Thomassin est rapidement soupçonné. Cet acteur découvert par Jacques Doillon est tombé dans la délinquance et les excès suite au tournage. Enfant de la DDAS, il est resté dans la marge malgré ses succès au cinéma.

Florence Aubenas prend ce fait divers à bras le corps. Une enquête minutieuse sur ce qui a pu arriver à Catherine Burgod mais aussi sur le destin d’un jeune homme prometteur. C’est une enquête en immersion mais on lit ça comme un véritable roman. Florence Aubenas égrène les évènements et capte l’attention du lecteur comme dans un véritable page-turner. Elle donne la parole à tous les protagonistes, tous ceux ayant eu un lien avec l’histoire ce qui donne encore plus de puissance au récit.

La vie de Gérald Thomassin est en effet digne d’un roman à la Dickens. Abandonné par sa mère, père inconnu, élevé dans des foyers, livré très tôt à lui-même, alcoolique, drogué, il aurait pu s’en sortir grâce au cinéma mais on n’échappe pas facilement à ses démons. Florence Aubenas reste toujours observatrice sans jamais prendre de partie.

Un récit passionnant sans conclusion car l’affaire n’est toujours pas résolue.

Edition de l’Olivier

« Dust » de Sonja Delzongle

Hanah Baxter est une profileuse. Française installée à New-York, elle traque les serial killers du monde entier.

Un vieil ami à elle, Collins, la contacte pour qu’elle vienne les aider sur une enquête inquiétante. Elle part donc pour le Kenya où depuis deux ans, la police découvre des scènes de crime sur lesquelles est répandue une grande quantité de sang humain mais sans cadavre.

A cette enquête s’ajoute celle sur le trafic d’albinos qui sévit dans la région. Les albinos étant considérés autant comme signe du diable que comme bénéfiques à la création de fétiches par les sorciers. Une jeune femme albinos vient d’ailleurs de se faire massacrer en pleine rue, son assassin n’en voulant qu’à sa tête et son bras restant.

Hanah va se plonger dans ces deux enquêtes qui vont lui révéler la noirceur de l’âme humaine.

Le précédent livre de Sonja Delzongle que j’ai lu se passait au Groenland, dans des paysages blancs immaculés. « Dust » se déroule au Kenya, la chaleur et la poussière du pays transparaissent dans le livre. L’auteure est vraiment douée pour immerger le lecteur dans l’univers qu’elle a créé. On est tout de suite oppressé par le climat comme peut l’être Hanah.

Les sujets évoqués ici sont terrifiants. Le massacre des africains albinos, la récupération de leurs membres à des fins pseudo-médicales font froid dans le dos. Je connaissais déjà le sujet mais on a du mal, occidentaux, à se rendre compte de ce qu’il se passe en Afrique.

Les meurtres sont traités de manière crue, sans fioriture, le lecteur ne sera pas épargné. La violence est monnaie courante au Kenya, on n’y échappe donc pas.

Comme à son habitude (peut-être est-ce dû à son passé de journaliste), Sonja Delzongle, en plus d’écrire un très bon thriller, interpelle le lecteur sur un sujet de société.

A ne pas manquer si on veut passer un bon moment et s’interroger sur ce qu’il se passe dans d’autres parties du monde.

Édition Folio.

« L’ile du Diable » de Nicolas Beuglet

Dans ce nouvel opus, on retrouve Sarah Geringën sortant de prison. En effet suite à sa dernière enquête et une terrible méprise, l’inspectrice des forces spéciales avait été emprisonnée à tort.

Mais alors qu’elle sort enfin, on lui annonce que son père a été assassiné. La mise en scène macabre laisse à penser que Sarah ne connaissait pas aussi bien son père qu’elle le croyait.

Elle se voit confier l’enquête de manière officieuse et ne va cesser d’être surprise.

Dans ce troisième roman Nicolas Beuglet continue de nous épater par sa maîtrise du suspense. Son héroïne a peu de répit, à peine sortie de prison elle est embarquée dans une quête vers la vérité. Il y a très peu de temps mort dans cette histoire, tout s’enchaine vite et j’ai eu l’impression de le lire d’une traite.

D’ailleurs le seul bémol que je pourrais émettre serait qu’il est trop rapidement lu. On aurait aimé que ça dure un peu plus et peut-être qu’il y ait plus d’interactions entre Sarah et Christopher.

Beaucoup de rebondissements donnent un rythme intense. En résumé un bon thriller!

Éditions Pocket

« Octobre » de Søren Sveistrup

Une jeune femme est retrouvée dans une aire de jeux pour enfants. Son corps mis en scène est amputé d’une main, un petit bonhomme fabriqué en marrons accroché au-dessus d’elle. L’enquête est confiée à Naia Thulin, qui pense à son prochain départ de l’équipe, et à Mark Hess, transfuge de Europol. Très vite une deuxième femme est assassinée avec la même mise en scène. On découvre que les empreintes d’une petite fille disparue depuis un an apparaissent sur les marrons.

Je n’en dis pas plus car il faut vraiment découvrir ce thriller sans en savoir trop. Je ne connaissais pas moi-même l’histoire, je m’étais laissée guider par toutes les bonnes critiques que j’avais vu passer. Et je l’ai dévoré.

Tout est bien fait dans cette histoire. Le prologue qui intrigue, les scènes de crime macabres, les personnages de policiers tout en failles et questionnements, l’ambiance tendue et le dénouement inattendu. Une maîtrise du suspense qui tient tout le long, des petits rebondissements qui nous font croire qu’on a compris qui était le meurtrier.

Je me suis laissée totalement embarquer par ce premier roman. Søren Sveistrup est le scénariste de la série « The Killing », on sent la technique du raconteur d’histoires.

Bref très efficace et addictif, tout ce qu’on attend d’un bon thriller.

Édition Le Livre de Poche

« Qaanaaq » de Mo Malø

Qaanaaq Adriensen est envoyé au Groenland pour une enquête. Adopté à l’âge de trois ans, il n’est jamais revenu sur sa terre natale. Il y va de mauvaise grâce, habitué à mener ses enquêtes à Copenhague.

Trois ouvriers d’une plateforme pétrolière ont été retrouvés sauvagement assassinés. Tout laisse penser qu’ils auraient été attaqués par un ours. Épaulé par l’inspecteur Apputiku, il va devoir conduire ses investigations malgré l’ambiance haineuse envers les danois et la responsable locale qui ne voit pas son arrivée d’un bon œil.

Enfin je peux dire que j’ai lu un roman policier de Mo Malø. Encensé sur les réseaux sociaux pour son dernier opus, il me semblait plus juste de commencer par le premier afin de découvrir les prémices de son personnage principal, Qaanaaq.

Loin d’être déçue j’ai retrouvé tout ce que j’aime dans ce genre de romans scandinaves. Une ambiance hors du commun dans des contrées hostiles, des personnages brut de décoffrage qui vivent selon des coutumes ancestrales et bien sûr une enquête passionnante.

On fait connaissance avec Qaanaaq, inspecteur danois intuitif et droit dans ses bottes. Il part au Groenland pour résoudre des meurtres mais aussi pour découvrir une partie de son passé. Mo Malø mêle les deux trames avec brio.

Idéal pour les fans (comme moi) des auteurs nordiques.

Édition Points

« Seul le silence » de R.J.Ellory

Au fin fond de la Géorgie, Joseph, douze ans, vit seul avec sa mère, son père étant récemment décédé. Près de chez eux des fillettes sont sauvagement assassinées après avoir été violées. Cela dure depuis quelques mois, Joseph découvre même une des victimes aux abords de sa maison. Cet évènement va le marquer à jamais. Et même alors qu’il aura quitté la région pour s’installer à New-York, cette histoire va le rattraper, les meurtres n’ont jamais cessé.

Premier roman de R.J.Ellory édité en France, « Seul le silence » marque le début d’un auteur important, qui a son univers à lui et sa façon propre de raconter des histoires.

« Seul le silence » est un roman prenant, intense. Ellory nous compte l’histoire de Joseph, un homme aux prises avec les démons de son enfance, hanté par les meurtres barbares de petites filles qu’il connaissait. Exceptionnellement doué pour l’écriture, il va s’en servir pour exorciser tout ça. Accablé par les évènements tragiques qui traversent sa vie, il n’aura de cesse de trouver l’assassin.

Un roman dense et poignant. On suit ce personnage de son enfance à son âge adulte et on est en totale empathie avec lui. Comment peut-on vivre en endurant tant de souffrance? Un roman noir avec en filigrane ces meurtres commis par un esprit complètement dérangé.

Je ne peux que vous le recommander.

Édition Le Livre de Poche

« La vallée » de Bernard Minier

Lire un roman de Bernard Minier mettant en scène son personnage fétiche Martin Servaz, c’est comme retrouver un membre de la famille. Dans le dernier opus, « Sœurs » on l’a laissé en piteux état et on a envie de prendre de ses nouvelles.

Martin Servaz se remet donc doucement des derniers évènements, l’opération de son fils s’est bien passé mais il est sur le coup d’une mise à pied suite à sa dernière enquête, il a été rétrogradé et ne doit plus rentrer en contact avec ses collègues. Un coup de fil va perturber ce semblant d’équilibre. Marianne, son ancienne compagne, disparue depuis 8 ans, l’appelle à l’aide du fin fond des Pyrénées.

Voilà notre héros qui se précipite dans la vallée où le téléphone de Marianne a borné. Il n’a aucune idée de ce qui l’attend. Deux meurtres particulièrement atroces viennent justement d’y être commis. De manière informelle, il va épauler son ancienne collègue Irène Ziegler qui est sur l’enquête.

J’ai dévoré ce nouveau thriller de Bernard Minier. Plus de cinq cents pages qui se lisent facilement car l’auteur a le don de nous mener là où il a envie. Difficile pour le lecteur de ne pas vouloir connaître la suite. Il y a de la tension, du suspense, des personnages ambigus et un environnement, la montagne, qui est lui-même un personnage à part entière. « La vallée » est un huis clos gigantesque où le mal sévit, lieu de mises en scène macabres.

En le refermant il nous tarde juste de savoir quelle sera la prochaine épreuve de Martin Servaz!

XO Éditions

« Le jour des cendres » de Jean-Christophe Grangé

Au sein d’une communauté anabaptiste appelée « Les Émissaires », un meurtre a été commis. Le chef de ce groupe isolé au cœur de l’Alsace est mort enseveli sous les voutes de la chapelle en rénovation. Si l’accident est dans un premier temps évoqué, essentiellement par les adeptes de la communauté, Niémans est appelé pour éclaircir les choses.

Sa coéquipière Ivana est déjà là sous couverture. Elle a été engagée pour faire les vendanges, le seul moment de l’année où des étrangers sont autorisés à entrer sur les terres des Émissaires.

Dans cette communauté religieuse où la non-violence et l’innocence sont élevées comme des étendards, qui a bien pu commettre l’irréparable? Les membres de cette secte sont-ils tous si inoffensifs ?

Jean-Christophe Grangé continue sur sa lancée de « noveliser » un épisode de la série « Les Rivières Pourpres » diffusée sur France Télévisions. Personnellement je n’ai pas regardé la série donc pour moi, c’était de l’inédit! On retrouve donc avec plaisir le commandant Niémans, toujours aussi bourru et limite misogyne, et sa collègue Ivana, à fleur de peau.

Grangé nous immerge dans un monde clos, celui d’une communauté religieuse aux principes ancestraux. L’ambiance y est assez pesante, les gens mutiques. La région alsacienne et l’époque des vendanges rajoutent de la densité à cette atmosphère déjà lourde.

Jean-Christophe Grangé délaisse les scènes d’hyper violence auxquelles il nous a habitué pour nous offrir un thriller qui joue plus sur le suspense et une tension latente.

Un roman court et efficace

« Chanson douce » de Leïla Slimani

« Chanson douce » de Leïla Slimani.
Chroniques de livres et conseils de lecture par MLBA.

 

Myriam et Paul ont deux enfants, Mila et Adam. Myriam a très envie de reprendre le travail et justement un ancien collègue avocat lui propose un poste. La reprise du travail implique de trouver une nounou pour s’occuper des enfants qui sont encore petits. Après un petit casting les parents tombent d’accord pour choisir Louise. Elle a une petite quarantaine, est très discrète et sait y faire avec les enfants.

La vie change complètement pour Myriam et Paul. Louise se montre très vite indispensable.

Ce que le lecteur apprend dès le début du roman c’est que la nounou a assassiné les deux enfants qu’elle gardait.

Leïla Slimani nous met tout de suite dans une ambiance un peu glauque, un peu dérangeante. Le livre est construit comme un grand flashback. L’auteur nous montre petit à petit ce qui a pu amené Louise à commettre l’irréparable.

Très angoissant et oppressant, « Chanson douce » est un thriller efficace.

Edition Gallimard

 » « ma nounou est une fée. C’est ce que dit Myriam quand elle raconte l’irruption de Louise dans leur quotidien. Il faut qu’elle ait des pouvoirs magiques pour avoir transformé cet appartement étouffant, exigu, en un lieu paisible et clair. Louise a poussé les murs. Elle a rendu les placards plus profonds, les tiroirs plus larges. Elle a fait entrer la lumière. »

 

« Helena » de Jérémy Fel

"Helena" de Jérémy Fel. Chroniques de livres et conseils de lecture par MLBA.
« Helena » de Jérémy Fel. Chroniques de livres et conseils de lecture par MLBA.

Vous aimez les ambiances oppressantes?
Vous aviez lu et aimé « Les loups à leur porte »?
Voici ma potion:

Kansas, Etats-Unis.

Hayley, 17 ans, prend la route pour aller chez sa tante.Elle doit s’entrainer pour un tournoi de golf auquel elle va participer. Elle s’est inscrite à ce tournoi un peu pour rendre hommage à sa défunte mère qui avait de grands espoirs pour elle dans ce sport.

Mais en chemin, elle tombe en panne. Elle choisit de quitter l’autoroute afin de trouver un garage mais elle se retrouve immobilisée sur le bord d’une petite route de campagne. Pour elle c’est l’enfer qui commence.

Heureusement Norma,  une mère de famille qui habite à côté, se trouve à passer par là et lui propose de l’emmener chez elle afin d’appeler un dépanneur. Le courant passe instantanément entre les deux femmes.

Voilà comment le destin fait se rencontrer deux personnes. Destin qui se joue des gens et va chambouler la vie de toute une famille.

Jérémy Fel revient trois ans après « Les loups à leur porte« . Un premier roman qui avait beaucoup marqué par son intensité et sa violence. Et le moins que l’on puisse dire c’est que l’auteur ne déçoit pas nos attentes.

« Helena » c’est un thriller écrit au cordeau qui distille une tension latente. Le lecteur est pendu aux mots, aux phrases de l’auteur. Il nous tient en haleine du début à la fin, avec des personnages fouillés, travaillés.  Ils ont tous à leur manière des motivations sensées. Norma, Hayley et Tommy tombent, malgré eux, dans une spirale terrible et le lecteur est aussi entrainé, on frémit de ce qui va leur arriver.

Véritable ode à la violence et au malaise, « Helena » est à part de tout ce qui se fait de nos jours en littérature française. Si on devait comparer Jérémy Fel à un auteur ça serait certainement à Stephen King, dans sa manière d’instiller une tension, un trouble, sans trop en dire, tout en nuance.

Ce roman met en lumière la puissance de l’amour maternelle, ce qu’une mère est prête à faire pour sauver ses enfants. L’importance des actes d’une mère sur le futur de son enfant.

Jérémy Fel joue aussi avec le hasard et donc l’idée de destin. Comme quoi il ne tient à pas grand chose que votre vie bascule dans le bien ou le mal. On peut tous à tout moment passer la barrière morale qui nous fait tenir du bon côté. Et si vous vous demandez qui est Helena, et bien je vous laisse le découvrir.

Un livre qui va vous prendre aux tripes.

Editions Rivages