« La femme périphérique » de Sophie Pointurier

Aujourd’hui je vous parle de “la femme périphérique” de Sophie Pointurier, édité chez Harper Collins.


Peter et Petra Wolf sont un couple d’artistes de la scène allemande reconnu dans le monde entier. Ils sont entourés de mystère, plutôt discrets, Peter Wolf n’ayant pas été vu depuis longtemps, c’est toujours Petra qui s’occupe des relations publiques. Alors qu’une biographie se prépare sur le couple et qu’une rétrospective est prévue au Met à New-York, on commence de plus en plus à se poser des questions sur l’absence de Peter. Une enquête s’ouvre pour disparition.


Comme dans un véritable thriller Sophie Pointurier va démêler le vrai du faux et entrainer le lecteur dans une course-poursuite de la vérité. Pour cela nous allons plonger dans l’histoire obscure de l’Allemagne des années 90, au moment de la chute du mur et dans les méandres du monde de l’Art.


C’est passionnant ! Sophie Pointurier aborde divers sujets très intéressants, la chute du mur de Berlin évidemment mais aussi la place de la femme dans le monde de l’art. J’ai d’ailleurs appris que les œuvres féminines étaient moins cotées que les masculines ce qui semble, à notre époque, ahurissant.


Une belle découverte ! Merci aux éditions Harper Collins de me l’avoir fait parvenir.

Editions Harper Collins

« Adieu demain » de Michael Mention

Aujourd’hui je vous parle de “Adieu demain” de Michael Mention, édité chez Rivages Noir.
Vingt ans après l’arrestation d’un tueur en série surnommé “l’éventreur du Yorkshire”, des femmes sont à nouveau assassinées, transpercées par un carreau d’arbalète. Le superintendant Mark Burstyn déjà sur l’enquête vingt ans plus tôt craint que tout recommence. Epaulé par l’inspecteur Clarence Cooper, ils se donnent corps et âmes dans la recherche du coupable.


J’ai été soufflé par la façon dont cette histoire est narrée. On suit, parallèlement à l’enquête, Peter sur plus de vingt ans de sa vie. Un jeune homme marqué très tôt par la violence de son père, le divorce de ses parents et la rencontre en prison du fameux éventreur du Yorkshire. Non seulement l’auteur nous fait entrer dans l’esprit de ses personnages mais il nous donne aussi à voir les grands évènements marquants de la Grande Bretagne des années 70 à nos jours. Les personnages évoluent avec leur temps et c’est presque une chronique sociologique qu’il nous offre là. Avec en fond une bande son excellente.


C’est en tous cas un thriller ingénieusement mené qui nous met à bout de souffle tellement il est intense. Je n’avais pas lu “Sale temps pour le pays” qui serait le premier volet de cette trilogie, je vais remédier à cet oubli.

Editions Rivages

« Le fil des souvenirs » de Victoria Hislop

Aujourd’hui je vous parle de “Le fil des souvenirs” de Victoria Hislop, édité aux éditions Les Escales et au Livre de Poche.


Pour répondre à la question de leur petit-fils qui veut savoir pourquoi ils ne quittent pas Thessalonique, Dimitris et Katerina décident de lui raconter leur histoire intimement liée à celle de la ville. De la naissance de Dimitris en 1917 qui a précédé le grand incendie qui ravagea la ville à la dictature des colonels dans les années 70, en passant par la seconde guerre mondiale, tout un pan de l’histoire de cette ville grecque nous est relaté. Ou comment la petite histoire rejoint la grande.


Victoria Hislop, dont c’est ici le deuxième roman, a un vrai talent de conteuse. Déjà dans “l’ile des oubliés” elle nous avait subjugué avec l’histoire de la Crète. Ici nous sommes en Grèce à Thessalonique et elle m’a totalement transporté dans cette contrée lointaine et inconnue pour moi. J’ai senti les odeurs, entendu les bruits, elle a vraiment réussi à me faire voyager. J’ai aussi frémi avec les personnages qui se prennent le cours de l’Histoire en pleine poire. Je ne savais pas tout ce que ce pays avait pu endurer à travers le temps, j’ai encore appris des choses et j’ai aimé ça.


Victoria Hislop aime ses personnages et réussit tout à fait à nous les faire aimer également. Comme dans une vraie saga, j’ai aimé la trame romanesque qui suit le destin contrarié de Katerina et Dimitris. Très beau!

Apparition de Viktor Vincent

Aujourd’hui je vous parle de “Apparition” de Viktor Vincent. Premier roman pour cet auteur, plutôt connu en tant que mentaliste.


Sam est ouvreur au théâtre des Elysées, il rêve de rencontrer Alexandre Kreskine, un des plus célèbres illusionnistes au monde, qui se produit actuellement au théâtre. Lui-même féru de tours de magie, il souhaite aussi découvrir ce qu’il s’est vraiment passé lors de l’assassinat de son frère, auquel Kreskine serait mêlé. Une relation malsaine démarre entre les deux hommes.


Premier thriller pour Viktor Vincent qui prend pour thème le monde de la magie et du spectacle qu’il doit connaitre par cœur. On sent d’ailleurs en le lisant que l’auteur sait de quoi il parle, il nous fait entrer dans ce monde à part. Le personnage de Kreskine est mystérieux, plusieurs chapitres sur sa jeunesse éclairent un peu les zones d’ombre mais le malaise l’entoure. Archétype du personnage très sombre et complexe, professeur dominateur, Kreskine est presque un cliché mais on y croit.


On pourrait reprocher que la quête de départ de Sam, la résolution du meurtre de son frère, passe en second plan derrière la relation qu’il entretient avec son mentor. Ça n’en reste pas moins un bon roman à ambiance qui lève quelques voiles sur des tours de prestidigitation.
Prometteur.

Fleuve Editions

Heurs et malheurs du sous-majordome Minor de Patrick DeWitt

Aujourd’hui je vous parle de “Heurs et malheurs du sous-majordome Minor” de Patrick DeWitt, édité chez Actes Sud. J’ai découvert cet auteur avec “les frères sisters”, un western décalé, adapté au cinéma par Jacques Audiard en 2018.
Ici nous allons suivre Lucy Minor, un jeune homme méprisé et rejeté par son entourage qui accepte une offre d’emploi de sous-majordome au château von Aux. Après des rencontres malheureuses qui le délestent de sa bourse et de sa pipe, il arrive au château et fait la rencontre de M. Olderglough, le majordome. Il découvre peu à peu son nouvel univers très déroutant et rencontre au village Klara dont il tombe amoureux.
Difficile de résumer ou de “pitcher” ce roman tellement il est fantaisiste. Si vous ne connaissez pas encore la plume de Patrick DeWitt, sachez qu’il excelle dans l’humour noir, les personnages étranges et les situations rocambolesques, tout ça pour servir au lecteur une histoire souvent caustique.
L’atmosphère de ce château et de ses environs est oppressante, tous les personnages agissent bizarrement et au milieu de tout ça Lucy évolue, se fond dans le paysage et se découvre enfin. Il ne sera fait aucune mention de temps ou de lieu, ce qui rend cette histoire d’autant plus fantastique.
En lisant ce livre j’avais l’impression d’être dans un film de Wes Anderson, il y a du “Grand Budapest Hotel” et du “Darjeeling limited” dans cette histoire, tout ça mâtiné avec un peu de Tim Burton.
Je vous conseille de découvrir cet ovni littéraire.

La bête en elles de Camille Lysière

Aujourd’hui je vous parle de “La bête en elles” de Camille Lysière, édité chez Eyrolles. J’ai rencontré l’auteure lors d’un salon, je ne la connaissais pas mais le sujet de son livre m’a interpellé et comme elle m’en a très bien parlé, je me suis dit que j’allais découvrir.


Marie a 17 ans, elle vient de passer le bac et pour se faire un peu d’argent elle monte à Paris pour travailler tout l’été. Elle sera hébergée par des amis de ses parents. Olivier, journaliste, et Sylvaine qui travaille à la télé. Tout se passe pour le mieux jusqu’à cette nuit où Olivier s’invite dans sa chambre et la viole. Marie est tétanisée. Que faire ? On ne croira jamais une jeune fille face à cet homme connu. Quand le viol se reproduit, toute volonté l’abandonne.
Marie n’est pas la seule à vivre ça. A des époques différentes, d’autres jeunes filles ont vécu ce même traumatisme.

Camille Lysière traverse le temps pour nous montrer la même histoire et la façon dont chaque personnage réagit selon l’époque. Avec à chaque fois la même rage en elles.
C’est un procédé que je n’avais encore jamais lu je crois. Réécrire la même histoire en changeant juste les prénoms et la période temporelle. C’est très intelligent et met en relief l’idée que de tout temps les femmes ont été victimes de viol, l’auteure pointe du doigt non seulement le traumatisme physique mais surtout le traumatisme psychologique qui en résulte.
C’est très juste dans le fond et très bien écrit pour la forme.
A découvrir si le sujet vous intéresse.

Sœur de Abel Quentin

Aujourd’hui je vous parle de “Sœur” de Abel Quentin.

Jenny Marchand a 17 ans et le mal-être chevillé au corps. Elle est introvertie, n’a pas d’amis, ne se retrouve pas dans cette famille provinciale où il ne se passe pas grand-chose. Jusqu’à sa rencontre avec Dounia, une jeune musulmane qui lui accorde l’intérêt qu’elle n’a jamais trouvé auprès des siens.

Abel Quentin réussit à dépeindre la dérive adolescente de manière magistrale. On entre totalement dans la tête de cette jeune fille qui est tellement désespérée que l’idée d’un sacrifice semble la seule issue pour elle. L’auteur montre les rouages de l’endoctrinement qui parait si facile avec un esprit si perturbé. Enfin Jenny entend les mots qu’elle souhaitait entendre, enfin on lui offre de la considération. Il ne s’agit pas là de démontrer comment la radicalisation s’opère, Jenny n’est pas croyante à la base mais plutôt comment un esprit faible peut être facilement corrompu.

La mise en place du récit est très efficace, on sent la tension qui monte au fur et à mesure et même si la fin semble inéluctable, on se surprend à espérer qu’elle soit différente. L’histoire se déroule pendant une campagne présidentielle, difficile de ne pas penser à ce qu’il se passe en ce moment. Difficile aussi de ne pas faire le rapprochement avec ce qu’on peut lire dans les journaux sur des adolescents qui décident de partir faire une guerre qui n’est pas la leur.

Bref un roman qui se lit comme en apnée où on peut recommencer à respirer une fois le livre refermé.

Mexican gothic de Silvia Moreno-Garcia

Aujourd’hui je vous parle de “Mexican gothic” de Silvia Moreno-Garcia, édité chez Bragelonne. Dans ma pile depuis quelques mois, il me tardait de trouver le bon moment pour le lire.

Noemi Tabaoda, une jeune mondaine aimant les soirées festives, se voit confier une mission par son père. Aller rendre visite à sa cousine Catalina qui vient de leur envoyer un courrier très alarmant. Celle-ci récemment mariée à Virgil Doyle parle d’empoisonnement et de fantômes, elle semble plus que perturbée. Noemi se rend donc à High Place, fief de la famille Doyle où l’accueil qu’elle reçoit est plutôt hostile. Les habitants et la maison elle-même semblent cacher quelque chose

.Dans une ambiance plus que tendue, Silvia Moreno-Garcia nous propose un roman digne des romans gothiques du 19ème. Il y a du Bram Stoker, du Mary Shelley et même du Matthew Gregory Lewis (il faut lire “le moine”). Le style est peut-être moins habile ici mais l’auteure ne démérite pas avec cette histoire inquiétante et angoissante. Tous les ingrédients sont là pour que le lecteur n’ait pas envie de poser le livre. Il y a du rythme, de bons personnages, un peu d’humour et surtout une histoire horrible à souhait qui fonctionne hyper bien.

Une très belle surprise !

Fille de Camille Laurens

Aujourd’hui je vous parle de “Fille” de Camille Laurens, édité chez Gallimard. J’ai ce livre depuis deux ans dans ma pile et j’avoue que j’hésitais à le lire par peur, que ça me touche trop ou que ça ne me plaise pas, je ne sais pas. J’ai senti que le moment était venu de l’ouvrir.

Laurence nait à Rouen à la fin des années cinquante. C’est la deuxième fille de la famille. Quand on demande à son père s’il a des enfants, il répond “non, j’ai deux filles”. Je crois que tout est dit dans cette phrase. Le sujet du livre et la problématique terrible qui va étreindre Laurence toute sa vie.

Est-ce qu’on vaut moins quand on est une fille ? Comment peut-on se construire en sachant que nous n’étions pas désirés pour ce que nous sommes ? Et lorsque Laurence devient mère à son tour, que transmettre à cette fille à qui on donne la vie ?Avec une écriture sensible et très juste Camille Laurens aborde tous ces sujets qui, pour une femme, peuvent être terriblement violents. Sans tomber dans le féminisme, quelle femme n’a pas un jour subi une remarque sexiste ou déplacée du fait de son sexe ? J’ai été profondément touché par ce texte que j’ai trouvé d’une vérité dingue, comme l’impression d’ouvrir le journal intime de l’auteure et de me plonger dans son âme.

Ce livre touchera certainement plus les femmes que les hommes mais je conseille à ces messieurs de l’ouvrir, ils pourraient apprendre un ou deux trucs.

Dernier jour sur terre de David Vann

Aujourd’hui je vous parle de “Dernier jour sur terre” de David Vann. Ce n’est pas un livre récent, j’ai décidé d’essayer d’alléger ma pile à lire en exhumant des livres achetés il y a longtemps !

En 2008 dans une université américaine Steve Kazmierczak, 27 ans, tue cinq personnes et en blesse dix-huit autres avant de se donner la mort. David Vann revient sur cet évènement en essayant de comprendre ce qui pousse un jeune homme à commettre un tel acte.

L’auteur s’appuie sur la comparaison entre lui et le meurtrier. Après tout, lui aussi a été élevé au milieu des armes, il a appris à tirer extrêmement jeune, son père lui a montré comment abattre un cerf de sang-froid. Ce père, adulé, qui finit par se suicider une arme à la main. Alors pourquoi, lui, David Vann, s’en est sorti et pourquoi, Steve, a sombré dans une spirale qui l’a conduit à ce fameux 14 février 2008.

C’est un livre très intéressant avec un message fort en filigrane, sur la violence engendrée par la légalisation du port d’armes aux Etats-Unis. L’auteur met aussi en lumière le manque de suivi pour ceux qui ont des troubles psychologiques, en l’occurrence Steve, qui est livré à lui-même. Aurait-il commis ce crime si les bonnes personnes l’avaient accompagné ? Tant de questionnements qui ne justifient pas le geste mais tendent à l’expliquer.

Entre récit, témoignage et enquête, “dernier jour sur terre” est une plongée dans l’horreur mais aussi une critique acerbe de l’Amérique d’aujourd’hui qui produit ses propres tueurs de masse.