« Dust » de Sonja Delzongle

Hanah Baxter est une profileuse. Française installée à New-York, elle traque les serial killers du monde entier.

Un vieil ami à elle, Collins, la contacte pour qu’elle vienne les aider sur une enquête inquiétante. Elle part donc pour le Kenya où depuis deux ans, la police découvre des scènes de crime sur lesquelles est répandue une grande quantité de sang humain mais sans cadavre.

A cette enquête s’ajoute celle sur le trafic d’albinos qui sévit dans la région. Les albinos étant considérés autant comme signe du diable que comme bénéfiques à la création de fétiches par les sorciers. Une jeune femme albinos vient d’ailleurs de se faire massacrer en pleine rue, son assassin n’en voulant qu’à sa tête et son bras restant.

Hanah va se plonger dans ces deux enquêtes qui vont lui révéler la noirceur de l’âme humaine.

Le précédent livre de Sonja Delzongle que j’ai lu se passait au Groenland, dans des paysages blancs immaculés. « Dust » se déroule au Kenya, la chaleur et la poussière du pays transparaissent dans le livre. L’auteure est vraiment douée pour immerger le lecteur dans l’univers qu’elle a créé. On est tout de suite oppressé par le climat comme peut l’être Hanah.

Les sujets évoqués ici sont terrifiants. Le massacre des africains albinos, la récupération de leurs membres à des fins pseudo-médicales font froid dans le dos. Je connaissais déjà le sujet mais on a du mal, occidentaux, à se rendre compte de ce qu’il se passe en Afrique.

Les meurtres sont traités de manière crue, sans fioriture, le lecteur ne sera pas épargné. La violence est monnaie courante au Kenya, on n’y échappe donc pas.

Comme à son habitude (peut-être est-ce dû à son passé de journaliste), Sonja Delzongle, en plus d’écrire un très bon thriller, interpelle le lecteur sur un sujet de société.

A ne pas manquer si on veut passer un bon moment et s’interroger sur ce qu’il se passe dans d’autres parties du monde.

Édition Folio.

« No home » de Yaa Gyasi

"No home" de Yaa Gyasi. Chroniques de livres et conseils de lecture par MLBA.
« No home » de Yaa Gyasi. Chroniques de livres et conseils de lecture par MLBA.

Vous aviez aimé « Racines » de Alex Haley?
Vous espérez vous coucher moins bête ce soir?
Voici ma potion:

Au XVIIIème siècle au Ghana (anciennement la Côte de l’Or), deux filles naissent de la même mère mais dans deux villages différents, des villages rivaux, les Ashanti et les Fanti.

Alors qu’Effia, surnommée « la Beauté » est repérée par le nouveau gouverneur britannique en place et devient pour quelques sous sa « femme africaine », Esi est enlevée et emmenée au fort (dirigé par ce fameux gouverneur) où sont entassés les futurs esclaves en attente de partir pour le nouveau continent.

Chapitre après chapitre le lecteur va suivre la destinée des deux soeurs et de leurs descendants.

Ceux qui auront atterris en Amérique vont connaitre les affres de l’esclavagisme, dans les champs de coton et autres mines de charbon. Ils vont surtout connaitre la ségrégation, le racisme et la violence faite aux Noirs, à toutes les époques.

Les descendants de Effia, restés sur le continent africain auront aussi à faire face à de terribles bouleversements. Ils devront continuer pendant longtemps la pratique du commerce triangulaire initié avec les Anglais, continuer à profiter des guerres entre village pour enlever leurs rivaux et les revendre. Malgré l’éducation et l’aisance qu’ils pourront acquérir, ce lourd passé sera dur à porter et la fuite vers les Etats-Unis sera le seul moyen de se libérer.

Sur trois siècles Yaa Gyasi nous raconte l’histoire de cette famille noire, tiraillée par les guerres, par l’esclavagisme, et surtout par la cruauté de l’homme blanc. Elle parsème son récit de détails sur les coutumes africaines, sur la vie des esclaves dans les mines de charbon, sur l’arrivée de la drogue à Harlem dans les années 60. Chaque époque est très bien documentée et on y apprend beaucoup de choses.

Magnifiquement écrit, le lecteur suit avec plaisir et intérêt ces destinées. A travers une pléiade de personnages on voit et comprend l’évolution de la société. Chaque chapitre alterne d’un continent à un autre sans jamais que l’on soit perdu.

C’est un roman sur la condition des Noirs à travers les siècles mais aussi sur la condition de la femme noire, qui doit se montrer forte et vaillante pour porter la famille.

C’est tout simplement un livre sur la liberté.

Edition Calmann-Levy.

 

« Debout-Payé » de Gauz

"Debout-payé" de Gauz. Chroniques de livres et conseils de lecture par MLBA.
« Debout-payé » de Gauz. Chroniques de livres et conseils de lecture par MLBA.
Vous avez envie d’un roman sans concession?
Vous aimez l’humour noir?
Voici ma potion:

« Debout-payé: désigne l’ensemble des métiers où il faut rester debout pour gagner sa pitance. »

Dans ce premier roman, Gauz nous embarque dans la vie de différents personnages. Ossiri, étudiant ivoirien qui débarque en France dans les années 90, et Ferdinand, qui lui, atterrit en France dans les années 60. Malgré les années qui séparent ces deux ivoiriens, malgré la société qui évolue, ils ne trouveront qu’un seul emploi, celui de vigile.

Gauz raconte l’histoire de ces africains de manière humoristique, mais d’un humour très mordant. On rit beaucoup, surtout lors des intermèdes où l’on a un aperçu des situations incongrues qui arrivent aux vigiles. On a droit aussi à quelques réflexions générales sur le métier plutôt cocasses. Ils surveillent, on ne les voit plus mais eux voient tout.

« Axiome de Camaïeu: Dans un magasin d’habits, un client qui n’a pas de sac est un client qui ne volera pas. »

« Souvent les femmes grosses commencent d’abord par essayer des habits plus petits…avant de disparaître avec la bonne taille dans les cabines d’essayage. »

Beaucoup d’humour donc mais sans une grosse dose d’ironie et de causticité. Gauz décrit le quotidien des africains déracinés de manière très lucide et sans compromis, demanière authentique car lui-même est passé par là.

Un livre sur la société de consommation, sur l’immigration, sur les banlieues, autant de sujets brûlants.

Un roman drôle et important.

Édition Livre de poche